Les tératomes, encore appelés dysembryomes ou tumeurs dysembryoplasiques, sont des tumeurs qui se développent à partir des cellules germinales primitives (cellules précurseurs des gamètes : ovocytes chez la femme, spermatocytes chez l’homme).
Les tératomes représentent 2 à 4 % des tumeurs de l’enfant et de l’adulte jeune. Nous faisons le point.
Qu'est-ce qu'un tératome ?
Les tératomes résultent d'un phénomène de néoplasie des cellules embryonnaires à l’origine des gamètes. Les tératomes sont composés de tissus provenant des trois feuillets embryonnaires appelés l’endoderme, l’ectoderme et le mésoderme (ces trois feuillets sont à l'origine de l'ensemble des organes et des tissus de l'organisme).
Les tératomes touchent le plus souvent les gonades (ovaire, testicule), mais ils peuvent parfois affecter d’autres localisations :
- le cerveau, notamment au niveau de l'épiphyse (glande pinéale) ;
- le médiastin (région de la cage thoracique située entre les deux poumons contenant le cœur, l'œsophage, la trachée et les deux bronches souches) ;
- le rétropéritoine (région de l'abdomen) ;
- le cou ;
- les yeux ;
- la région sacro-coccygienne (entre les lombaires et le coccyx) ;
- le cœur.
Selon le stade de différenciation de la tumeur, plusieurs catégories de tératomes sont définies :
- Les tératomes immatures, également appelés des térato-carcinomes, sont des tumeurs solides et malignes. Ces tumeurs se composent de tissus embryonnaires, généralement capables de synthétiser de l’alpha-fœtoprotéine (marqueur tumoral).
- Les tératomes matures sont des tumeurs bénignes et kystiques. Ces tumeurs sont composées de tissus bien différenciés, dérivés d’un à trois feuillets embryonnaires.
- Les tératomes mixtes dans lesquels se retrouvent des structures matures et immatures.
Bon à savoir : les tératomes sont le plus souvent des tumeurs très volumineuses. Le traitement repose habituellement sur la chirurgie d’ablation de la tumeur. D’une manière générale, les tératomes sont peu sensibles à la radiothérapie et à la chimiothérapie.
Tératomes testiculaires
Tératome testiculaire de l'enfant et de l'adulte
Les tératomes testiculaires sont rares (2 à 6 % des tumeurs du testicule) et touchent généralement les enfants et les hommes vers l’âge de 30 ans. Chez les enfants, ces tératomes sont des tumeurs matures bénignes, tandis que chez l’adulte, ce sont des tumeurs malignes, même s'ils peuvent être matures, immatures ou mixtes (tératome associé à d’autres formes de tumeurs).
Le tératome testiculaire est mis en évidence par la présence d’une masse évoluant depuis en moyenne 3 mois. Le diagnostic repose sur une échographie testiculaire et sur un scanner abdomino-pelvien pour rechercher de potentielles métastases.
Le traitement repose sur l’orchidectomie (ablation des testicules) élargie ou non aux ganglions inguinaux. Toute masse décelée lors du scanner abdomino-pelvien doit également être retirée par chirurgie. Une surveillance par scanner est instaurée suite à la chirurgie.
À noter : un traitement de chimiothérapie est indiqué dans les formes métastatiques.
« Growing teratoma »
Le « growing teratoma » une forme particulière de tératome, qui correspond à l’évolution d’une masse tumorale à partir d’un tératome testiculaire traité par chimiothérapie.
Une masse tumorale évolue à partir d’un ganglion dans différentes localisations :
- rétropéritonéale (dans l'abdomen) ;
- médiastinale (entre les poumons et le cœur) ;
- sus-claviculaire (près de la clavicule) ;
- pulmonaire ;
- osseuse ;
- hépatique.
Les symptômes observés résultent de la compression d’organes au cours du développement de la tumeur. La tumeur peut aussi être détectée au cours des scanners de contrôle.
Le traitement est uniquement chirurgical, car ces tumeurs sont résistantes à la radiothérapie et à la chimiothérapie.
Tératome avec contingent somatique malin
Le tératome avec contingent somatique malin (souvent noté TCSM) était autrefois nommé le tératome cancérisé :
- Il correspond à la transformation d’un tératome testiculaire en un autre type de tumeur (sarcome, carcinome, etc.).
- Cette transformation de la tumeur peut rester localisée au niveau des testicules ou envahir d’autres territoires (médiastin, rétropéritoine).
- Le traitement est chirurgical, associé ou non à une chimiothérapie.
Zoom sur les tératomes ovariens
Les tératomes ovariens sont des tumeurs fréquentes (16 % des tumeurs ovariennes) et le plus souvent bénignes. Ils apparaissent souvent au cours de la trentaine, parfois découverts au cours d’une grossesse.
Les tératomes ovariens peuvent être de 3 types :
- les tératomes matures (kystiques, bénins) ;
- les tératomes immatures (solides et potentiellement malins) ;
- les tératomes monodermiques (carcinoïdes).
Tératome mature ovarien
Le tératome mature ovarien, encore appelé kyste dermoïde ovarien, est une tumeur bénigne fréquente, qui touche généralement les femmes vers l’âge de 30 ans. La tumeur peut toucher un seul ovaire (forme unilatérale), ou les deux (forme bilatérale) dans 15 à 20 % des cas.
Dans la majorité des cas, le tératome n’entraîne pas ou peu de symptômes (douleurs pelviennes, sensation de pesanteur), tant qu’ils restent d’une taille raisonnable.
Lorsqu’ils deviennent trop volumineux (au-delà de 10 cm), ils peuvent provoquer des complications :
- une torsion de l’ovaire ;
- une rupture de la tumeur ;
- une évolution en tumeur maligne ;
- une infection.
Le diagnostic du tératome est posé par des examens d’imagerie (échographie, scanner, IRM). Le traitement repose sur l’ablation de la tumeur par intervention chirurgicale.
Tératome immature ovarien
Le tératome immature de l’ovaire est une tumeur maligne, qui se développe chez la jeune fille avant l’âge de 18 ans. Le tératome immature et le tératome mixte sont considérés comme des tumeurs de haute malignité, peu sensibles à la chimiothérapie.
Le traitement repose sur la chirurgie d’ablation de l’ovaire. Dans certains cas, la chirurgie peut être complétée par une chimiothérapie.
Tératome monodermique ovarien
Le tératome monodermique de l’ovaire, encore appelé carcinoïde de l’ovaire, est une tumeur rare touchant les femmes au cours ou après la ménopause. La tumeur est majoritairement unilatérale. Elle peut être associée à un kyste dermoïde ou à d’autres types de tumeurs.
La tumeur carcinoïde sécrète une substance spécifique, la sérotonine, responsable d’un ensemble de symptômes appelés le syndrome carcinoïde :
- des troubles digestifs (diarrhée, ballonnements intestinaux) ;
- une rougeur de la peau ;
- des signes respiratoires proches de ceux de l'asthme ;
- des palpitations ;
- un gonflement du visage ;
- une perte d'appétit et/ou de poids.
Le traitement repose sur la chirurgie, associée ou non à une chimiothérapie.
Autres tératomes et leurs caractéristiques
Tératome sacro-coccygien
Le tératome sacro-coccygien est un tératome kystique bénin du fœtus touchant la région sacro-coccygienne (entre les vertèbres lombaires et le coccyx) :
- Il est diagnostiqué au cours de la vie fœtale, lors d'une échographie obstétricale.
- Il peut être associé à une spina bifida (développement incomplet de la colonne vertébrale).
- Le tératome sacro-coccygien concerne 1 naissance sur 35 000 à 40 000, et 75 % des fœtus touchés sont de sexe féminin.
- Il est le plus souvent une tumeur bénigne, qui se développe autour de la région pelvienne, soit à l’extérieur du corps, soit à l’intérieur de l’abdomen.
- Il peut être très volumineux (jusqu’à la moitié du poids du bébé), entraînant une compression des organes abdominaux (tube digestif, reins). Très vascularisé, il peut engendrer des troubles circulatoires à la naissance et nécessiter une intervention chirurgicale dès la naissance.
La découverte d’un tératome sacro-coccygien au cours de la grossesse entraîne une surveillance échographique hebdomadaire et un accouchement généralement programmé par césarienne.
Les principales complications pour le fœtus ne sont pas systématiques, mais elles sont graves :
- un hydramnios (excès de liquide amniotique) ;
- un anasarque fœto-placentaire (œdème généralisé du fœtus) ;
- une hémorragie à l’intérieur du tératome ;
- la mort fœtale in utero.
Le seul traitement possible est la chirurgie, effectuée rapidement après la naissance. Une reconstruction chirurgicale des fesses est souvent nécessaire après la chirurgie d’ablation de la tumeur. Le risque de récidive est évalué en moyenne à 10 %.
Tératome cérébral
Le tératome cérébral se développe le plus souvent au niveau de l’épiphyse (ou glande pinéale), mais il peut aussi être localisé au niveau de la moelle épinière, de la base du cerveau ou près de l’hypophyse. Le tératome cérébral représente 1 à 2 % des tumeurs cérébrales mais 11 % des tumeurs de l’enfant.
Le tératome cérébral est responsable des symptômes suivants :
- une hypertension intracrânienne ;
- des troubles du mouvement des yeux (troubles oculomoteurs) ;
- des troubles endocriniens ;
- des troubles sensitifs ou moteurs ;
- des signes psychiatriques.
Le diagnostic du tératome cérébral est basé sur l’imagerie (IRM, imagerie par résonance magnétique) et sur les dosages sanguins de marqueurs tumoraux.
Le traitement repose sur la chirurgie pour enlever la tumeur, avec un bon pronostic (60 à 100 % de survie après 5 ans). Suite à la chirurgie, peuvent persister des maux de tête, des troubles des mouvements des yeux, voire un syndrome dépressif. Une radiothérapie peut être envisagée en complément de la chirurgie.
« Les traitements, en général très lourds, sont toutefois associés à un taux important de guérison, autour de 80 % chez l'enfant. Et depuis peu, au-delà de la chimiothérapie-chirurgie-radiothérapie, des traitements ciblés, voire l'immunothérapie, ont une place chez certains patients en échec de traitement », explique la Dr Birgit Geoerger (Gustave Roussy, Villejuif).
Tératome cervical
Le tératome cervical est une tumeur très rare chez le nouveau-né. Le tératome cervical est un tératome mixte, associant des structures matures et immatures :
- Il se positionne soit latéralement au niveau du cou, soit axialement au niveau du pharynx.
- Il est le plus souvent détecté au cours d’une échographie obstétricale. Une IRM (imagerie par résonance magnétique) et/ou un scanner permettent de confirmer le diagnostic.
Les tumeurs volumineuses peuvent entraîner une compression des voies aériennes (notamment de la trachée), risquant de provoquer une détresse respiratoire du nouveau-né à la naissance.
Le traitement repose sur une prise en charge de l’enfant à l’accouchement (recours à la césarienne, gestion de la détresse respiratoire potentielle) et sur la chirurgie juste après la naissance. Une chimiothérapie peut accompagner l’intervention chirurgicale en cas de résidus de tumeur après la chirurgie.
Tératome orbitaire
Le tératome orbitaire est une tumeur rare, mature ou immature, touchant les enfants dès la naissance. Le tératome orbitaire entraîne :
- une distension importante des paupières ;
- une exophtalmie (protrusion de l’œil) voire une disparition du globe oculaire ;
- une baisse de l’acuité visuelle ;
- une paralysie oculomotrice (incapacité à bouger les yeux).
Le tératome évolue très rapidement, il peut prendre le volume d’une mandarine, et mettre en jeu le pronostic vital de l’enfant. Le traitement repose sur la chirurgie qui doit être pratiquée le plus rapidement possible après la naissance. Le risque de récidives est très faible.
Tératome médiastinal
Les tératomes médiastinaux peuvent être bénins, malins ou mixtes. Le tératome malin médiastinal est une tumeur maligne rare très évolutive, touchant surtout les hommes jeunes. Les tératomes bénins médiastinaux sont soit des tératomes matures multi-tissulaires, soit des kystes dermoïdes mono-tissulaires.
Le tératome médiastinal provoque une compression des organes situés dans le médiastin, à l’origine des symptômes permettant la découverte de la tumeur :
- les poumons, la trachée et les deux bronches souches ;
- le cœur ;
- l'œsophage.
Le diagnostic des tératomes médiastinaux est posé devant la présence de calcifications sur une radiographie. Le seul traitement possible est la chirurgie pour enlever la tumeur.
Seule l’analyse de la tumeur après chirurgie permet de déterminer avec certitude le caractère bénin ou malin de la tumeur.
Tératome cardiaque
Le tératome cardiaque est une tumeur de structure complexe, très rare, généralement très grave, touchant les enfants de moins de 1 an. Le tératome cardiaque peut être localisé :
- le plus souvent au niveau du péricarde, près de la racine de l’aorte ou de l’artère pulmonaire ;
- plus rarement, à l’intérieur du cœur près de la paroi des oreillettes ou des ventricules.
Le tératome cardiaque est une tumeur volumineuse (de 2 à 15 cm), généralement immature. Le diagnostic est souvent posé lors d’une échographie obstétricale mettant en évidence la tumeur et parfois un épanchement du péricarde (infiltration anormale de liquide).
Les principaux risques du tératome cardiaque sont :
- chez le fœtus, un anasarque fœto-placentaire (œdème généralisé du fœtus) ou une mort in utero ;
- chez le nouveau-né, une détresse respiratoire, une cyanose et/ou une défaillance cardiaque.
Le traitement repose sur la chirurgie, particulièrement délicate pour les tératomes localisés à l’intérieur du cœur. Après la chirurgie, le pronostic est excellent pour l’enfant.
Tératome rétropéritonéal
Le tératome rétropéritonéal peut être bénin ou malin et peut toucher les adultes et très rarement, les nouveaux-nés et les enfants, avec une découverte lors des échographies obstétricales :
- Ces tumeurs se développent au sein du péritoine (dans l’abdomen).
- L’augmentation progressive du volume de la tumeur finit par provoquer une compression des organes proches.
- Chez l’adulte, les symptômes engendrés par ce phénomène de compression sont souvent à l’origine du diagnostic. Le diagnostic est confirmé par des examens d’imagerie (échographie, scanner et IRM).
- L’ablation chirurgicale de la tumeur est le seul traitement possible et doit être réalisée avant que la tumeur ne devienne trop volumineuse.
Bon à savoir : si on dispose de suffisamment de temps, mettre en place une prise en charge psychologique, une intervention nutritionnelle et surtout des exercices physiques d'aérobie (marche, vélo) à intensité modérée un mois avant l'intervention permet d'améliorer les capacités fonctionnelles du patient, sa qualité de vie et on réduit les risques de complications postopératoires.