Parmi les traitements du cancer, on trouve :
- la chimiothérapie ;
- la radiothérapie ;
- la curiethérapie ;
- l'hormonothérapie ;
- l'immunothérapie.
Immunothérapie : stimuler le système immunitaire
L'immunothérapie est une méthode de traitement permettant de lutter contre toutes sortes de maladies et notamment le cancer, en administrant des médicaments qui vont activer et mobiliser les défenses immunitaires.
Principe de l'immunothérapie
Cette activation peut se faire à l'aide :
- De traitements visant à stimuler directement la réponse immunitaire globale.
- De substances capables de bloquer les récepteurs responsables du freinage du système immunitaire face aux tumeurs.
- Des interleukines-2 ou des interférons (produits par génie génétique), le principe étant le même qu'avec un vaccin qui apprend au système immunitaire à reconnaître des cellules tumorales contre lesquels lutter, c'est-à-dire celles porteuses d'un antigène spécifique (à l'image du vaccin Provenge® contre les cancers de la prostate qui résistent à l'hormonothérapie). Cet « apprentissage » est nécessaire car le système immunitaire ne reconnaît pas naturellement les tumeurs malignes qui sont peu immunogènes (elles ne sont pas repérées par l'organisme qui va les laisser proliférer).
Remarque : par extension, l'immunothérapie désigne également les méthodes de traitement qui se servent des protéines fabriquées par le système immunitaire.
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Molécules employées en immunothérapie
Parmi les molécules employées, on trouve :
- le rituximab qui est utilisé pour traiter les lymphomes qui résistent à la chimiothérapie ou en cas de récidives ;
- le trastuzumab en cas de cancer du sein résistant en raison de la présence de récepteurs HER2 ;
- l'ipilimumab (médicament Yervoy®) et le pembrolizumab pour traiter les mélanomes ayant entraîné des métastases (car peu sensibles à la chimiothérapie) avec des résultats positifs de l'ordre de 20 % et avec 25 % de récidives en moins ;
- le nivolumab (à base d'anticorps monoclonaux plus spécifiques que l'ipilimumab et qui ciblent des anticorps spécifiques avec donc moins d'effets secondaires), lui aussi contre les mélanomes mais également contre les cancers avancés du rein, du poumon (efficacité remarquable couplé à la chimiothérapie avant une chirurgie) et les carcinomes épidermoïdes de la tête et du cou (tumeurs ORL) en seconde intention en cas d'échec des traitements à base de platine ;
- le pembrolizumab contre les mélanomes métastatiques (avec 30 % de résultats positifs et 12 % d'effets secondaires sévères) et les cancers des voies aérodigestives (en première intention si on retrouve l’expression du récepteur PDL-1 au niveau de la cellule cancéreuse). Ce traitement, avec le médicament Keytruda®, est désormais remboursé par l’Assurance maladie dans quatre nouvelles indications :
- le cancer du poumon bronchique à petites cellules (CBPC) même en l’absence de métastase,
- le cancer de la vessie (une combinaison d’anticorps conjugué – antibody drug conjugate ou ADC – et de pembrolizumab est très efficace en première ligne en cas de cancer de la vessie métastatique),
- le lymphome de Hodgkin en cas d’échec thérapeutique (il est agréé chez l'enfant de plus de 10 ans comme chez l'adulte),
- le mélanome (tous les patients aux stades III et IV pour lesquels le mélanome a été entièrement réséqué doivent être traités par nivolumab et pembrolizumab pour une efficacité chez 40 % d'entre eux).
Bon à savoir : dans son bilan 2019, la revue médicale indépendante Prescrire reconnaît d’ailleurs l’utilité du pembrolizumab pour allonger la survie en cas de cancer bronchique métastasé.
Types de cancers traités par l'immunothérapie
L'immunothérapie peut être utilisée sous forme de traitement d'attaque (traitement général) ou de façon préventive pour éviter les récidives (traitement local à l'aide d'injections).
À noter que l’immunothérapie est de plus en plus régulièrement employée dès la première ligne de traitement dans les situations localisées, car elle permet des gains en survie sans progression et en survie globale.
Immunothérapie curative ou préventive ?
On l'utilise d'un point de vue préventif dans le cadre du cancer de la vessie (et de plus en plus de la plèvre et du col de l'utérus à un stade localement avancé ou métastatique) pour réduire les risques de rechutes suite à une ablation par chirurgie ou suite à une chimiothérapie suite à laquelle on observe pratiquement toujours une rechute de la maladie dans un délai variable.
Bon à savoir : l’association en immunothérapie d’un anti-PD1, le pembrolizumab, à la chimiothérapie, montre son efficacité sur la survie globale et la survie sans progression (+30 %) dans les cancers du col de l’utérus métastatiques. De même, le dostarlimab (Jemperli®) est depuis le 23 octobre 2023 une immunothérapie anti-PD-1 disponible pour les femmes atteintes d’un cancer de l’endomètre avancé en association avec une chimiothérapie à base de sels de platine.
Le traitement est local puisqu'il s'agit de stimuler l'immunité uniquement au niveau vésical en y injectant du BCG.
D'un point de vue curatif, l'immunothérapie consiste à injecter des activateurs du système immunitaire (anticorps, cytokines, immunoglobulines, interleukine-2 ou interférons produits par génie génétique) dans l'ensemble de l'organisme. Le traitement est général puisque le corps entier va en bénéficier.
Tableau des champs d'application de l'immunothérapie curative
Type d'activateur | Type de cancer |
---|---|
Interférons en injections sous-cutanées (les interférons alpha sont employés si la tumeur a une épaisseur supérieure à 1,5 mm et s'il y a un envahissement des ganglions lymphatiques) |
|
Interleukines-2 en perfusion continue ou en injections |
|
Anticorps monoclonaux |
|
Immunothérapie chez l'enfant
Depuis 2007, les industriels développant un médicament chez l'adulte doivent aussi le faire chez l'enfant. « Cette règle a largement changé la donne ces dernières années en accélérant l'accès aux thérapies innovantes, avec à la clé plusieurs autorisations de mise sur le marché en oncopédiatrie » (cancer chez l'enfant), explique la Dr Birgit Geoerger (Gustave Roussy, Villejuif).
Toutefois, « guère plus de 5 à 7 % des tumeurs pédiatriques présentent des altérations spécifiques susceptibles aujourd'hui de bénéficier [de ces thérapies ciblées] ». De plus, la grande variété des tumeurs pédiatriques et la rareté de plusieurs d’entre elles ne facilitent pas l'identification de cibles potentielles.
Aussi, pour maximiser les possibilités thérapeutiques en oncopédiatrie, a été lancé un vaste projet international consacré au séquençage des tumeurs pédiatriques en échec et à la recherche des thérapies ciblées dont elles pourraient bénéficier. Parallèlement, un programme européen étudie les thérapies ciblées et/ou les immunothérapies, chez les enfants, adolescents et jeunes adultes.
Source :Bautista F et al. Phase I or II Study of Ribociclib in Combination With Topotecan-Temozolomide or Everolimus in Children With Advanced Malignancies: Arms A and B of the AcSé-ESMART Trial. J Clin Oncol. 2021 Aug 4;JCO2101152.
À l'avenir, cela devrait permettre d'élargir les options thérapeutiques chez les enfants en échec thérapeutique.
Déroulement d'une immunothérapie
L'immunothérapie est généralement instaurée immédiatement après l'intervention chirurgicale. Elle peut se faire :
- à faibles doses à raison de trois injections trois fois par semaine pendant 18 mois ;
- plus rarement (en raison des importants effets secondaires), à fortes doses à raison de cinq jours de perfusion par semaine pendant un mois puis trois fois par semaine pendant onze mois.
Notez que cette seconde posologie est très rarement adoptée en France.
Bon à savoir : une étude menée par les chercheurs de l'Institut Gustave-Roussy et l'INSERM démontre que la prise d’antibiotiques (de 2 mois avant et jusqu’à 1 mois après le début du traitement), en déréglant le microbiote intestinal (dysbiose), affecte l’efficacité d’un traitement par immunothérapie chez des patients atteints d’un cancer. Or, un malade du cancer sur 4 est sous antibiothérapie. C'est ce qui explique en partie pourquoi certains patients ne répondent pas au traitement immunothérapeutique.
Effets secondaires de l'immunothérapie
L'immunothérapie est une méthode porteuse d'espoir. Néanmoins, outre le fait que son action n'est pas immédiate, de nombreux mécanismes restent inexpliqués :
- On ne sait par exemple pas pourquoi tous les patients ne réagissent pas positivement à cette technique (la réponse clinique sera de 20 % en cas de monothérapie et 36 % en cas d’ajout de chimiothérapie).
- D’origine auto-immune, les effets secondaires liés à l’immunothérapie sont imprévisibles. Ils peuvent intéresser tous types d’organes ou de tissus.
- De plus, même si elle fonctionne, elle finit par générer des phénomènes de résistance difficiles à éviter.
Par ailleurs, les oncologues hésitent encore à associer les molécules entre elles ou à les enchaîner, à les associer ou non à une chimiothérapie, etc. Pourtant, chez les patients qui ont besoin d’une réponse rapide soit parce qu’ils sont symptomatiques, soit parce que l’état clinique est rapidement évolutif, une combinaison immunothérapie/chimiothérapie est nécessaire.
L’association de l'immunothérapie aux thérapies ciblées (traitements dont le but est de moduler l’environnement des cellules tumorales) entraîne à la fois des toxicités additives et des toxicités superposées. Ils sont indépendants de la dose de traitement, peuvent apparaître à tout moment et nécessitent un traitement par corticoïdes.
Au final, la durée de vie globale des patients n'est que faiblement augmentée alors que les effets indésirables sont très importants (et plus fréquents qu'avec les traitements standards) avec notamment :
- des troubles cutanés dans 60 % des cas (rashs, prurit, vitiligo) ;
- des pneumonies ou des dyspnées de pneumopathies interstitielles ;
- des syndromes grippaux fréquents ;
- des nausées et des maux de ventre (10 à 15 % des cas) ;
- des atteintes hépatiques (10 % des cas, avec par exemple des cytolyses et des cholestases) ;
- des hépatites auto-immunes ;
- des diarrhées qui peuvent se compliquer de perforation digestive ;
- une importante rétention d'eau (notamment avec l'interleukine-2 qui est pourtant plus efficace que les interférons) ;
- des dépressions (notamment les interférons) ;
- une importante fatigue et une perte d'appétit (en raison de la toxicité digestive des traitements) et donc de poids ;
- des troubles musculo-squelettiques (dans 10 % des cas) : arthralgies, lombalgies, rhumatisme inflammatoire, myosite, vascularite... ;
- des troubles thyroïdiens (l’hypothyroïdie est l’effet indésirable sérieux le plus fréquent) ;
- des troubles endocriniens (dans 10 % des cas) auto-immuns irréversibles (diabète de type 1, insuffisance surrénalienne, hypophysite...) ;
- des troubles de la formule sanguine, etc.
Ces effets secondaires surviennent principalement quelques semaines à trois mois après le début du traitement. Parfois, une année après. L'éducation thérapeutique des patients recevant un traitement immunothérapeutique est donc essentielle pour permettre une meilleure compréhension des toxicités potentielles et améliorer leur détection précoce.
Plus le traitement sera efficace et plus la toxicité peut être élevée mais l'inverse n'est pas vrai : ce n’est pas parce qu’il y a des effets secondaires importants que le traitement sera plus efficace.
Une étude qui a été menée à l'Institut Gustave-Roussy (présentée le 2 juin 2014) indique que chez les 951 patients ayant participé à l'étude du Yervoy® (molécule ipilimumab), le traitement a été si mal toléré que plus de 50 % des malades l'ont interrompu en raison d'effets indésirables et que cinq patients sont décédés.
Malgré tout, certains traitements semblent efficaces. Ainsi, lors du congrès annuel de l’American Society of Clinical Oncology (ASCO) en juin 2019, des chercheurs présentaient une étude publiée plus tard dans le Journal of Clinical Oncology portant sur des patients atteints de cancer du poumon. Le Keytruda® pris en première intention ou après un autre traitement était respectivement associé à une augmentation de la survie de 38,9 mois et 16,8 mois.
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